La course commence lors de la montée au refuge du promontoire en traversant depuis la Grave par la brèche de la Meije 3357m, on emprunte un astucieux cheminement à travers le pilier des enfetchores, ce qui constitue un échauffement sérieux et rompt la monotonie d’une randonnée pédestre sans obstacle.
On s’encorde dans le réfectoire après le petit déjeuner, et commençons à grimper dès le premier pas à l’extérieur sur un rocher toujours bon et riche en prises. En surmontant vaillamment pléthore de passages célèbres, aux noms se référant à l’épopée des premiers ascensionnistes, on ne peut que s’émerveiller devant le constat sans appel : nous allons bien plus vite de nos jours. Sans doute le père Gaspard se marchait-il sur la barbe en grimpant. La légende dit qu’alors aux prises avec le fameux dièdre du cheval rouge, dérapant dans ce passage au rocher trop lisse avec ses souliers cloutés, il se produisit ainsi des étincelles qui auraient mis feu à son fabuleux postiche. Ce qui expliquerait rationnellement que pour des raisons d’hygiène et de sécurité la longueur de la barbe soit désormais réglementée chez les guides.
Du sommet du grand pic, entre la joie de la contemplation et la fierté de l’exploit accompli, nous oublions un instant seulement que nous ne sommes pourtant qu’à la moitié du parcours. Si la suite semble moins dure, la dent Zsygmondy réserve des surprises glaciaires qui tranchent avec la douceur du rocher de la face sud. C’est tout suffoquant et blême qu’on rejoint le soleil qui nous accompagne sur l’aérien fil des arêtes jusqu’au doigt de dieu où nous rejoignons le glacier en songeant à la collation du refuge de l’aigle.
Sans chauvinisme aucun, nous pouvons dire qu’il s’agit bien de la plus belle course des alpes, voire de la galaxie.
Guides des Ecrins